18 mars 2016

Arrivée sur la Cordillère des Andes

        Cap à l'Ouest, direction la Cordillère ! Enfin ! 
Mon petit détour par la côte Atlantique (4.000 bornes quand même, mais ça passe vite !) et la semaine entre potes dans les relativement bas reliefs de Córdoba m'avaient ouvert l'appétit, mais je l'ai plutôt vécu comme un tour de chauffe avant le vrai départ... Et maintenant je n'étais plus qu'à quelques jours de route de ces lacets et cols andins ! :)
Je me suis quand même d'abord calé la première vraie pause du voyage pour récupérer de cette longue série de roulages (seulement 3 jours sans bouger sur les 25 derniers :P), visiter un peu Córdoba, faire un peu de nettoyage & maintenance sur la moto après cette session ripio, installer les deux derniers bidons d'essence sur l'avant des valises latérales, ajouter plus de pré-charge à l'amorto pour mieux compenser l'excès de bagages, et enfin faire redresser la jante avant voilée peut-être en bonne partie responsable de ces oscillations si gênantes constatées dans les zones sableuses de notre escapade... Et ça tombait bien en terme de météo, il a plus toute la semaine sur Córdoba !
Je voulais aussi aller faire un tour de parapente du côté de La Cumbre (nord de Córdoba) avec un mec rencontré quand je prenais des cours de parachutisme sur BsAs, André et son "Aero-Atelier", et remettre mes roues dans un peu de ripio avec tous les bagages chargés, juste pour voir. Une agréable balade par la R54 à l'aller où j'ai pu apprécier le comportement sain de la moto chargée sur ce beau chemin de terre passant près du mont "Pan de Azúcar", et passage rapide par l'Aero-Atelier pour saluer André avant de continuer vers le spot de parapente à Cuchy Corral, un mirador sur le Rio Pinto d'où décollent les voiles. Les conditions météo n'étaient malheureusement pas bonnes malgré l'absence de pluie - trop de vent - et j'ai croisé sur l'arrivée au mirador les derniers parapentistes qui quittaient le lieu. Un bien joli spot pour une pause café ! :)
Petite aparté sur un point technique qui j'espère sera transparent pour vous : fini les 100Mo de Blogger - 2'30" c'est vraiment pas gérable, je posterai maintenant des liens vers YouTube pour du HD grand écran (720p).   ;)









        Après ces quelques jours de repos & bricolage, j'ai enfin décollé vers les Andes en passant par un musée du Che dans la maison d'une partie de son enfance à Alta Gracia, touchant, et par un col de las Altas Cumbres pris dans un nuage. J'y ai appris à faire des pauses plus souvent quand le thermomètre installé sur le guidon descend à 4˚C ! 
Une fois quitté Mina Clavero où j'ai passé la nuit, les courbes se sont malheureusement faites de plus en plus étirées et espacées jusqu'à finir en d'immenses lignes droites au milieu de paysages désertiques, de plus en plus arides à mesure que je m'approchais de la Cordillère. Mon étape suivante à Luján (3.000 hbts) n'a duré qu'une nuit grâce à l'aide de Fernando, un local rencontré autour d'un burger qui m'a sorti une épine du pied : la veille la moto avait accroché sur une pierre au niveau du point d'attache de la béquille centrale, tordant et cassant la vis qui malheureusement sert aussi de fixation au repose-pied... Et il faut avouer que c'est pas pratique de pas savoir où poser ton pied quand tu roules ! Une partie de la vis tordue était donc restée coincée dans le trou la recevant, et Fernando est parvenu à la sortir en forant au milieu, me permettant de la remplacer par une neuve que j'avais d'avance. 
Les deux jours suivants se sont résumé à d'interminables lignes droites où les arbres ont progressivement disparu au profit des buissons épineux, la terre devenant plus rouge et ocre, et la bande de bitume en bon état de plus en plus étroite au fil que je m'enfonçais dans les terres abandonnées par l'Etat & les hommes... Quelques animaux seuls ou en troupeau coupent parfois la route, et quelques huttes de terre crue ou d'assemblages de matériaux couvertes de branchages ou de tôles apparaissent de temps en temps au milieu des buissons, mais globalement le temps y semble assez long ! Rien à dire sur Chepes où j'ai passé la nuit entre ces 2 jours, sinon que je ne recommande pas d'y faire étape : logement & bouffe pourris, sans aucun doute la pire étape de mon voyage.
Malgré un impressionnant et divertissant petit écroulement de chaussée suite aux inondations de 2014 en roulant vers San Juan, ce n'est qu'en approchant de Villa San Agustín del Valle Fertíl (VSA pour la suite) que la route a recommencé à devenir sympa avec à défaut de courbes horizontales (virages) au moins quelques courbes verticales épousant les "vadenes" naturellement creusés dans le décor par l'écoulement des fontes de glace des sommets proches. 
Vous noterez dans les prochaines vidéos quelques rares plans où j'ai déposé la GoPro sur le bord de la route pour me filmer en train de passer devant... 10mn de pause entre manipulations & aller-retour pour 10s d'images sympas qui changent de la prise sur le casque, profitez-en bien parce que ça m'a vite gavé et je n'en ai fait que quelques uns !
Arrivé en début de soirée sur VSA, je me suis calé dans un hostel sympa et me suis remis avec un petit cabrito asado en planifiant ma visite du lendemain au fameux "Valle de la Luna" dont j'avais entendu parler avant même de quitter BsAs par l'ami Pingo.   :)














        Cette jolie zone entre La Rioja & San Juan comprend deux parcs majeurs d'Argentine, l'un sous autorité provinciale / accessible avec son propre véhicule / pas cher (100 Ar$ / 7 US$) - Ischigualasto alias Vallée de la Lune, et l'autre sous autorité nationale / accessible en navettes organisées / un peu plus cher (450 Ar$ / 30 US$) - Le Canyon de Talampaya, séparés l'un de l'autre d'une trentaine de kms. Franchement les deux valent la peine et sont très différents l'un de l'autre. 
Ce qu'ils ont en commun aussi est l'absence de logement touristique à au moins 70 bornes à la ronde, VSA au sud étant le plus proche, et Villa Unión une alternative à 80kms au nord. L'idée est donc soit d'aller d'une de ces deux villes à l'autre dans la journée en se faisant les 2 parcs d'un coup - pas évident à mon avis car chacun prend facile 3h, soit de se poser dans une de ces villes et faire quelques aller-retours depuis cette base. Je pensais pour ma part opter pour la première stratégie, mais j'ai été contraint à la seconde après avoir non seulement fait ma deuxième chute à l'arrêt du voyage (en mettant la roue avant sur un relief de béton à la descente de la béquille centrale... toujours aucune en roulant par contre, je touche du bois !), mais surtout pour m'être ruiné les lombaires à essayer instinctivement de retenir sa chute et ensuite tenter de la relever sans enlever les bagages pour ne pas perdre une 1/2h ! 
J'ai bien senti sur le coup que j'avais merdé et me suis aussitôt posé pour décharger en douceur. Le planning du jour s'est réduit à une injection dans le cul prescrite par le couple proprio de l'hostel (lui kiné & elle pédiatre) et une méchante session de tri des bagages, en laissant pour le lendemain le seul Valle de la Luna, et en théorie le Canyon de Talampaya & Villa Unión pour le surlendemain. Mais je ne réalisais pas encore à quel point je m'étais ruiné...
J'en avais décidément ma claque de cet incroyable excès de bagages, et ai donc passé l'après-midi à trier le "vraiment nécessaire" du "pas mal à avoir au cas où". Au final, c'est un des deux sacs étanches plein que j'ai renvoyé par courrier postal à Carlos à BsAs, 10kg de moins qui ont aussitôt fait une différence appréciable sur la conduite ! Ce qui a giclé pour aller remplir ce sac, en vrac : les chaussures moto en cuir qui me servaient surtout pour marcher à part quand j'ai prêté mes bottes à Dany, une veste imperméable qui faisait doublon avec une cape imperméable décathlon que je pensais n'utiliser qu'en piéton, une veste coupe-vent que j'espérais avoir pour des sorties treks comme le Machu Picchu, le camel-bag que je n'utilise jamais, le matelas gonflable qui aujourd'hui me manque un peu maintenant que j'ai commencé à camper, un jean kevlar que décidément je n'aurais presque jamais porté, la sacoche achetée à Chuy pour tenter d'ajouter du poids à l'avant - expérience peu concluante et abandonnée, le hamac de poche prêté par Nico, le chargeur de batterie moto & le multimètre, la moustiquaire de camping, l'oreiller gonflable (lui aussi il me manque), et le Guide du Routard du Brésil dont je ne me servirai pas avant d'être repassé par BsAs de toute façon.
Et comble de la connerie, le soir même de cette deuxième chute, après n'avoir chargé sur la moto qu'un seul des deux sacs restants après ce tri en prévision du lendemain, je me suis offert la troisième chute à l'arrêt, cette fois non pas en descendant sur un rebord mais en manoeuvrant moteur éteint, la roue arrière accrochant sur le même putain de dénivelé ! J'avais heureusement tiré la leçon du matin : cette fois je l'ai laissée tomber comme une merde et pris le temps de tout démonter avant de la relever. Un incident visiblement sans influence sur le dos en rémission et sans dommages sur la moto... Quand même, je l'ai pas blindée de protections pour rien !
Le lendemain donc, réveillé sans douleur et plein d'enthousiasme, j'ai passé la matinée à envoyer mon colis vers BsAs et malgré une première douleur de la journée au moment de décoller vers le premier parc, je me suis lancé en début d'aprem à l'assaut d'Ischigualasto. 
Et il faut le dire : le Valle de la Luna mérite bien sa réputation, c'est un endroit magique dont les paysages & couleurs semblent venir d'une autre planète ! Des reliefs érodés & des formes géologiques torturées par les éléments datant de 180 à 230 millions d'années, des sols recouverts d'une poussière ultra fine, le tout allant du blanc/gris au vert en passant par l'ocre, le cuivre, et le sable, avec en fond de décor une immense falaise rouge vif et les nuages qui défilent à grande vitesse dans ce couloir gigantesque... :P Seuls quelques buissons parviennent à s'installer ici en raison des conditions météos et des caractéristiques des sols, et ces conditions extrêmes ont favorisé la préservation de fossiles entre autres choses, dont une vulgarisation est faite en un point du parc, entre deux curiosités géologiques.
Et le fait d'avoir pu le parcourir en moto n'a évidemment rien enlevé au plaisir ! A part quelques rares et légères douleurs lors de "manoeuvres d'urgence" dans le sable pour éviter la chute, je n'ai pas souffert du dos et ai maintenu mon optimisme à ce sujet jusqu'au retour en début de soirée à l'hostel de VSA.








  




        La douleur lombaire ayant malheureusement repris de plus belle au retour, j'ai été bon cette fois pour 3 jours de repos total avec une injection par jour d'un cocktail visiblement explosif, prescription que j'ai suivi avec soin pour changer. Ca m'aura au moins permis d'avancer un peu sur le blog !
Le quatrième jour enfin, ayant correctement récupéré mon dos, je me suis lancé avec toutes mes affaires en direction de Talampaya où je suis arrivé en fin de matinée. Très beau et impressionnant canyon à la terre rouge et aux pistes de sable ocre, avec là encore une peu d'archéologie et un parcours de reconstitutions d'animaux à l'entrée. Une fois acquitté de son droit d'entrée, le touriste est réuni en petits groupes d'une dizaine, chargé dans un mini-van avec un guide, et trimballé d'un bout à l'autre du canyon & retour avec quelques pauses le long du trajet... Pas aussi sympa que d'avoir sa liberté de mouvement, mais ça fait passer un moment avec des gens. Superbe canyon en tout cas, qui en met plein les yeux qu'on soit en mini-van ou en moto !
Après une balade finale en el Sendero del Triásico, je suis reparti en direction de Villa Unión où j'allais enfin rejoindre la mythique Ruta 40 ! Un trajet encore globalement rectiligne mais je voyais de plus en plus nettement à l'horizon se dessiner de superbes et hauts reliefs aux couleurs variées, cette fois c'était vraiment l'arrivée sur la Cordillère des Andes... J'en frétillais sur ma selle depuis presque 5 ans ! :D
Soirée tranquille à Villa Unión, bled fantôme perdu au creux d'une vallée reculée. Et le lendemain je faisais mes premiers tours de roue sur une Ruta 40 en travaux au début, puis sur un bel asphalte tout fraîchement terminé (ils avaient rouvert la route la veille après plusieurs mois de travaux) à travers la superbe Cuesta de Miranda, un col taillant son chemin à travers des roches exploitant toutes les nuances du rouge et parsemées de touffes vertes et jaunes d'herbes sèches et des premiers cactus du voyage ! Quelques fortes rafales de vent dans la journée m'ont fait me souvenir d'un certain "vent Zonda" dont les locaux parlaient depuis quelques jours et j'ai pensé que sans doute il s'agissait de ce dernier... J'étais loin du compte comme j'allais m'en rendre compte le lendemain ! 










  





        Je n'ai pas particulièrement apprécié Chilecito non plus et n'y ai passé qu'une nuit, mais j'étais satisfait d'en avoir fini avec les interminables rectilignes des plaines. Maintenant ça allait être les lacets andins pour un moment ! :)