9 nov. 2015

Les préparatifs_Part 3 - Moto

        Sans surprise, la première étape de la préparation moto est de s'en procurer une ! Et à ce stade, chacun choisira selon son projet, ses affinités, et surtout ses moyens dans la gamme disponible sur place. Il y a beaucoup à lire sur le sujet, et c'est évidemment un grand moment que d'essayer de se projeter avec différents modèles et finalement choisir le compagnon de route des quelques mois à venir, mais j'ai cru comprendre que tout peut se faire tant que le coeur y est, du scooter à la Yamaha R1 en passant par toute la diversité présente & passée du monde des 2 roues...

(Adam Hutchinson_Europe on a scooter & Reinhard Hohler_R1-RTW)


        Pour ma part, le type "trail" (mix route / off-road) s'est imposé comme la part raisonnable du choix, en prévision des chemins de terre que je souhaite emprunter d'une part pour profiter au max des zones traversées, et d'autre part de l'envie de ne pas souffrir du manque de confort en position & amortissement, considérant la durée importante du voyage.
La cylindrée de la catégorie des 600cc m'a quant a elle parue le juste équilibre entre la capacité à emmener des bagages d'un côté et limiter le poids en mouvement de l'autre. Les agréables 130kg d'une 250 comme la Honda Tornado ne permettrait que difficilement d'atteindre un minimum d'autonomie (camping / maintenance / etc), mais je ne serais vraiment pas à l'aise avec les 240kg sans équipements d'un monstre comme la BMW 1200GS en entrant dans des zones sableuses ou boueuses... Et puis de toute façon ce genre de machine n'est pas dans mon budget pour le dire gentiment ! :D

        Par chance, le modèle que j'ai choisi après quelques heures de lecture et investigation sur le sujet s'est révélé être disponible en Argentine, bien qu'à un tarif assez prohibitif : la Kawasaki KLR650 - alias la Jeep des motos, probablement la plus capable de sortir de l'asphalte dans cette catégorie (à l'exception de la KTM 690 mais elle n'est pas faite pour voyager). Par chance là encore, j'ai pu l'acheter fin 2013 d'occasion avec 15.000kms au tarif consommé de 75.000 AR$ (équivalent à ce moment à presque 10.000 US$... :x), juste avant la nouvelle salve d'augmentation d'impôts à l'importation début 2014 qui en a fait doubler le prix en quelques mois...

(Capture d'écran de l'annonce de vente de la KLR fin 2013)


        Pour un petit historique rapide de mon expérience 2 roues, sachez que je n'ai jamais eu de mobylette/scooter - sauf à conduire celle de mes potes, mon ami Cheb s'en rappelle encore - et que mon initiation à la moto il y a de ça une petite dizaine d'années en France s'est faite sur une Yamaha FZ6n-S1, une petite "naked" raisonnable de 78ch (600cc en 4 cylindres pour ceux à qui ça parle, et 4 temps bien sûr) pour commencer en douceur... Bien plus que nécessaire en réalité, mais tout bien considéré ce n'était pas un mauvais choix. J'ai suivi en France avec deux autres 600 naked : une Triumph Street Triple R (675 en 3 cylindres, juste magique !) avec laquelle je me suis initié le temps d'un été de folie aux joies du circuit de vitesse, et une Kawa ER6n (650 en 2 cylindres joueur) pour les derniers mois en France avant le départ en Argentine. 
J'ai donc perdu 1 cylindre à chaque changement de machine, et suivi la tendance en Argentine où j'ai roulé uniquement sur des monos... Il va être temps bientôt d'inverser la tendance ! :D

(FZ6 & ER6 en haut, ST3R en bas)


        Une fois arrivé dans ce nouveau pays, mon espoir de passer à une moto de plus de 100ch (la France est l'unique pays au monde à brider ses motos à 100ch :x) a été instantanément douché par les tarifs d'un autre monde du marché local (de 2 à 3 fois l'européen) et l'état de mes économies après ce fantastique été de pistard et le déménagement international...
J'y ai donc d'abord jeté mon dévolu sur une Honda XR250 - Tornado (typée quasi enduro) achetée à San Carlos de Bariloche 18.000 AR$ d'occasion (20.000kms), qui finalement m'aura presque comblé et que j'ai gardée jusqu'au moment de passer à la KLR. Entre temps, sur les quelques trois ans et demi en Argentine avant mon départ en voyage, je serais aussi passé quelques mois par une Honda NX4 - Falcon (petit trail de 400cm3, assez déçu pour un prix double à celui de la Tornado) et quelques semaines par une Honda CB250 - Twister (petite naked avec le moteur de la Tornado) pour vérifier si peut-être cet autre type de moto m'aiderait à accepter la faible cylindrée... Rien n'y a fait, je suis déjà habitué à la qualité de prestation des 600 en moteur & partie cycle (rigidité du cadre / amortissement / freinage), et même si c'est avec un léger pincement au coeur que j'ai vendu ma Tornado, même si la KLR décroche la palme du plus petit moteur de la catégorie des 600 (42ch !), j'étais tout de même vraiment content de retrouver ce niveau de machine.

(Tornado en haut - vous noterez qu'entre les 2 photos j'ai perdu la plaque d'immat' qui pendouillait déjà sur la 1˚, Falcon & Twister en bas)


        D'octobre 2013 à septembre 2015, c'est donc pendant deux ans que j'ai utilisé cette KLR en trajets quotidiens travail-domicile & loisirs, le temps de faire connaissance en douceur et de commencer par petites touches à la préparer pour ce voyage que je lui destinais dès l'achat.
J'ai d'ailleurs pu faire l'expérience de voir jusqu'à quel niveau d'eau je pouvais avancer moteur allumé, lors d'une inondation comme il y en a régulièrement dans ma dernière zone de résidence (Tigre) en raison de ce qu'ils appellent localement "una sudestada" - combinaison de marée montante et de vent du sud-est qui pousse les eaux du Rio de la Plata vers les terres et fais déborder tous les cours d'eau sur les zones urbaines audacieusement proches de ces derniers. J'ai eu de la chance ce jour de ne pas tordre la bielle du piston, mais ça m'a servi à délimiter le niveau maxi d'eau transitable avec ma jeep : quand l'eau arrive aux genoux - juste avant l'entrée du filtre à air, faut vraiment penser soit à un itinéraire bis soit à couper le moteur et continuer en poussant, ce que j'ai fait sur 3kms dans un bon mètre d'eau pour arriver à mon appart...!

(La KLR en mode amphibie)


        La KLR achetée étant donc entièrement d'origine et sans accessoires, si ce n'est le coffre "top-case" que j'ai gardé pour le voyage, il m'a fallu lui faire une préparation complète pour l'adapter aux besoins du projet : protections diverses, améliorations de la partie cycle (amorto adapté & durite de frein avia), ajout de supports latéraux pour valises & adaptation de l'interface supports/valises, ajout de quelques accessoires pour des besoins particuliers (monitoring de batterie et robinet d'extraction d'essence du réservoir + filtre à essence), correction d'un défaut de design connu (le fameux "doohickey" pour ceux qui se pencheraient sur la KLR), et installation de consommables de qualité supérieure (plaquettes de frein, gomards, et kit chaine). Voici une brève description du matériel et de son installation.

- Protections :
        Il faut bien avouer, la probabilité que je me mette quelques pelles au fil du voyage et de mon apprentissage off-road est plus qu'élevée, et installer quelques protections ne peut être qu'un bon investissement. Ce pack comprend des protège-leviers achetés sur place (RaceTech), des défenses latérales moteur elles aussi achetées sur place (ici ils appellent ça des "mata-perros" en raison de l'impressionnante quantité de chiens qui se jettent pour mordre les pneus quand tu passes), et un protège-carter alu fait maison pour remplacer celui d'origine en plastique. Les supports de valises - et en fait surtout les valises elles-même - feront aussi office de protection de la boucle arrière.




- Amortisseurs :
        Etant donné la lourde charge de bagages que j'ajoute pour ce voyage (entre 70 & 100kg) et l'importance d'avoir un amortissement adapté, et malgré le coût non-négligeable (380 US$ chez Happy-Trail + 120 US$ d'envoi en France pour récupération sur place à l'occasion d'un passage mémorable juste avant le départ), je me suis donc fendu d'un bon amorto arrière correctement calibré - i.e. avec un ressort correspondant à la charge prévue ("465 Series Progressive Shock"). Pour ce qui est de l'amortissement avant, il m'a semblé suffisant et je n'y ai pas touché (pas de ressorts de fourche progressifs, ni même de changement d'huile pour une viscosité supérieure), et pour l'instant je n'ai pas trop à m'en plaindre. 
Par contre je dois avouer que je tente de compenser mon excès de bagages par un réglage de pré-charge (les 2 bagues qui viennent comprimer le ressort) au-delà du recommandé, et je ne suis pas sûr que ça soit la solution à mon problème...



- Freinage :
        J'ai pensé un moment à bricoler l'ajout d'un deuxième disque + étrier à l'avant, mais l'opération aurait été assez coûteuse pour un résultat sans doute assez aléatoire. Je me suis contenté de changer la durite de frein avant en plastique (qui devient plus flexible avec la chaleur et perd donc en efficacité au freinage) par une durite de type "avia" (pour aviation) comme on dit en France - et "de acero trensado" en espagnol - qui elle résiste bien au changement de température et maintient correctement le niveau de pression sur les plaquettes.
Introuvables en Argentine, cette durite avia et 2 jeux de plaquettes de frein de qualité supérieure ont été commandés chez Happy-Trail, pour un prix inférieur à un simple jeu de plaquettes ici.



- Supports arrières & valises : 
        Un incontournable du voyage à moto. On peut choisir entre bagages souples ou rigides, mais il n'y a pas 36 solutions quant à leur emplacement sur la moto : soit on voyage très léger et on peut se contenter d'un sac sur la selle, soit on essaye d'emmener un peu plus et il faut alors aménager une structure sur les côtés de la boucle arrière. Et bien qu'il soit possible et préférable d'ajouter ensuite quelques bagages vers l'avant pour équilibrer la charge, il ne fait aucun doute que la grande majorité du poids emporté se situera dans la zone du passager - d'où l'utilité de changer au moins le ressort de l'amortisseur arrière
Pour ma part j'ai opté pour des valises rigides, considérant que la protection apportée au contenu contre les chocs et l'eau - en pensant aux éléments fragiles et importants comme le kit de premiers secours / filtre d'eau / réchaud à essence - compenserait raisonnablement le surplus de poids en comparaison de la solution souple. Pour l'instant je suis encore satisfait de mon choix !
Bien que les entraves aux importations argentines aient une fois de plus en partie limité le choix, je dois reconnaitre d'une part que les produits disponibles en Europe & aux USA m'ont semblé passablement hors de prix (de l'ordre de 800 US$ mini pour une paire de valises et près de 300 US$ pour leurs supports), et d'autre part que l'Argentine semble avoir développé en réponse à ces limitations une plus ample offre de petits artisans proposant des produits certes de qualité inférieure mais à des tarifs nettement plus abordables. J'ai ainsi pu acheter localement un jeu de supports et une paire de valises pour un total d'environ 4.000 AR$, soit +/- 400 US$ à ce moment. Bien qu'il m'ait fallu ensuite faire quelques efforts pour les rendre compatibles, ce tarif est sans l'ombre d'un doute plus adapté à mon budget !
J'ai donc d'abord installé les supports sans grande difficulté, puis adapté avec Carlos les valises aux supports... Bueno, pour être honnête, là c'est lui qui a tout fait, en raison des soudures à l'arc nécessaires pour lesquelles je n'avais ni le matériel ni le savoir-faire ! 
Pour cette adaptation, "on" a d'abord soudé en bas de la valise un rail en forme de "U" ouvert vers le bas pour venir appuyer le poids sur la barre inférieure du support. Puis on a soudé en haut de chaque support deux petites plaques percées chacune d'un trou pour recevoir une grosse visse que l'on a fait sortir de l'intérieur de la valise, chaque visse étant elle-même percée transversalement pour recevoir une goupille une fois insérée dans la plaque du support. Ainsi le poids de la valise est supporté presque exclusivement par la barre basse du support, et la partie haute ne sert qu'à plaquer latéralement la valise au support. Pas idéal, mais c'est la meilleure solution qu'on ait trouvé avec les moyens du bord ! Un deuxième trou sur une visse de chaque valise me permet enfin de passer un cadenas et ainsi sécuriser correctement leur fixation à la moto pour quand je la laisse sans surveillance.
Enfin, l'ajout de quelques sangles fixée par des rivets aux valises me permettent d'emmener quelques litres supplémentaires d'essence au cas où, correspondant avec 4 jerrikans de 2L chacun à une amélioration de 30% de mon autonomie, environ de 400 à 550kms.




- Accessoires :
        Contrairement aux batteries européennes qui sont scellées et ne demandent pas d'entretien, j'ai découvert après quelques tentatives de démarrage infructueuses que la plupart des batteries en Argentine peuvent et devraient être ouvertes de temps en temps, leurs cellules nécessitant un remplissage +/- fréquent avec de l'eau déminéralisée. Afin de pouvoir détecter en avance le manque de liquide et contrôler le voltage de la batterie sans avoir à démonter la moto (caches latéraux et siège), je me suis procuré chez Happy-Trail un multimètre qui reste connecté en permanence sur la batterie, et qui de plus indique la température relevée par un senseur déporté et affiche l'heure (finalement pas si inutile). Un petit support maison fabriqué avec/par Carlos est venu s'installer au-dessus des compteurs pour le recevoir.
Par ailleurs, mon choix d'utiliser un réchaud de camping à essence nécessitant un accès facile à celle du réservoir, on a inséré un raccord déconnectable entre le réservoir et le carburateur, et en avons profité pour ajouter un filtre à essence en prévision des carburants de qualité inférieure dans les zones reculées (gracias Toto !).
Enfin, j'ai ajouté une béquille centrale achetée sur place pour faciliter l'entretien et les réparations, et une prise 12V pour connecter le GPS ou le compresseur électrique, voire les gants chauffants si besoin (eh oui, cette petite merveille de lutte contre le froid existe, marque Gerbing's entre autres).





        Pour terminer, il me restait à régler un problème connu de longue date de la KLR : un défaut de design d'un élément interne au moteur, le fameux "doohickey" en anglais, un tendeur de chaine primaire qui a lâché sur un grand nombre de machines et qui en cas de rupture en fonctionnement a de fortes chances de détruire irrémédiablement le moteur en laissant libre cette chaine d'aller ruiner les engrenages voisins. Ce défaut est censé avoir été corrigé lors de l'unique modification de design que Kawasaki a daigné faire après 20 ans d'existence de cette machine, en 2008 pour une première sortie en 1987, mais la plupart ne sont pas convaincus et recommandent de le changer soi-même, juste pour être sûrs. Je n'ai pas fait le rat sur un problème réglable à peu de frais qui sinon risque de me laisser planté au milieu du désert avec une moto définitivement décédée, j'ai acheté et changé cette pièce dès que possible.
Par ailleurs, en prévision des diverses manipulations prévues et pour mettre toutes les chances de mon côté de pouvoir régler un problème tout seul, je me suis procuré le manuel d'entretien/réparation dédié à la KLR, en version papier pour ne pas dépendre de la batterie de l'ordi en cas de besoin sur le bord de la route.



        J'aimerais pouvoir dire que j'ai globalement préparé cette moto moi-même, mais il faut rendre à César ce qui appartient à Cesar : un grand Merci à toi Carlos, mon mécano en or et maintenant ami qui sans aucun doute a été l'un de ceux qui ont rendu mon voyage possible ! :)
En effet, bien que j'ai tenté le plus souvent possible de mettre les mains dans le cambouis pour apprendre par la pratique, lui demandant de me guider et de m'expliquer, c'est finalement lui qui a abattu la grande majorité du travail, avec le newbie à côté tentant de se rendre utile et d'apprendre par l'observation (et des tonnes de questions !). 
Grande Pingo ! :) 





        And just for fun, moi qui n'avais crevé qu'une ou deux fois en 4 ans sur BsAs, j'ai chopé un clou dans le pneu arrière en me rendant à l'atelier de Carlos à seulement quelques centaines de mètres d'y arriver, le lendemain d'avoir installé les toutes nouvelles chambres à air & pneus, à peine une petite semaine avant le départ... Résultat après avoir choisi de rouler 500m sur la jante jusqu'à l'atelier au lieu de réparer sur place : 8 trous dans la chambre à air toute neuve, 8 patchs à installer en guise d'entrainement intensif aux crevaisons !!!!!!!!



        Et finalement, juste à temps pour le grand départ mais sans avoir eu l'occasion de sortir faire un run d'essai d'une petite semaine dans le coin, la jeep était prête à en découdre ! Vamos ! Prêts pour aller faire un tour en Amérique du Sud ! :)



4 commentaires:

  1. C'est illisible pour moi...
    Réservé "aficionados", peut rien faire,
    J'comprends rien..

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  2. :D C'est vrai, c'est un peu technique et plutot pour ceux qui voudraient se lancer dans le meme délire.
    Tu noteras le clin d'oeil en intro à notre carton quand je conduisais ta brêle... Si j'avais eu une photo de son incrustation sous la caisse, je l'aurais collée !
    (PS: t'as vu comment j'ai noyée la KLR ? :P)

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  3. Intéressante cette vision de la moto amphibie... :))

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    1. N'est-ce pas ? Je continue d'ailleurs l'expérimentation par ici, depuis qq temps les routes et les cours d'eau ont tendance à s'enlacer joyeusement... :D

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